C’est un même souffle libérateur qui inspire les commandements du Décalogue (première lecture) et le récit de saint Jean des marchands chassés du Temple. Dans les deux cas, les croyants sont appelés à s’affranchir du culte des idoles qui menace sans cesse de les asservir.
Le Décalogue, c’est-à-dire les dix commandements que le Seigneur donne à son peuple rassemblé sur le Sinaï, est une invitation à un Amour plus grand, une loi de liberté, de respect, de partage et de fraternité : « Tu n’auras pas… Tu ne feras pas… ». Ils rappellent les impasses qu’il nous faut éviter pour ne pas retomber dans l’esclavage. Il s’agit de renoncer aux idoles, ces faux dieux qui revendiquent d’être l’absolu de l’homme et qui sont la course à l’argent, aux richesses matérielles, à l’accumulation des biens. Tout cela ne fait que nous enfermer dans notre égoïsme. Et la justification nous est donnée : « Je suis le Seigneur ton Dieu qui t’ai fait sortir du pays d’Égypte, de la maison d’esclavage ».
A L’occasion de la Pâque juive, Jésus se rend au Temple de Jérusalem et il se met en colère : « Enlevez cela d’ici, ne faites pas de la maison de mon Père une maison de trafic ». Il entend rappeler avec force que le Temple, c’est la maison de Dieu, le haut lieu du recueillement et de la prière, de la présence et de l’amour de Dieu par excellence.
Jésus ressent donc comme une offense très grave faite à Dieu et il ne peut tolérer que ce lieu privilégié devienne le lieu d’idolâtrie où l’homme détourne son cœur de Dieu. Il prend le fouet pour renverser les choses et ramener l’ordre dans le cœur de l’homme, le ramener à Dieu. Comment pourrait-on trouver Dieu dans un tel vacarme et le prier dignement dans un entrepôt commercial et un champ de foire ?
Frères et sœurs, chacun et chacune d’entre nous doit s’interroger : en quoi consiste le culte que je rends à Dieu ? Est-ce que je me contente d’assister à la messe ? 0u bien est-ce que j’y participe, en joignant à l’offrande du Christ, l’offrande de toute ma personne, et plus particulièrement de ce que je viens de vivre au cours de la semaine écoulée ? Est-ce que je suis comme Jésus et, en union avec Lui, brûlé de zèle, dévoré d’amour pour Dieu ?
« Détruisez ce sanctuaire, et en trois jours je le relèverai. » dit Jésus. Il va beaucoup plus loin que s’il disait « Détruisez ce Temple », car le Sanctuaire, c’était au cœur du temple, un tout petit édifice qui abritait la présence de Dieu. Jésus sera condamné à mort pour avoir prononcé cette phrase. Aux yeux des juifs, c’était un blasphème. Car ce Sanctuaire était l’orgueil de la nation juive, un lieu vénéré de prière et de pèlerinage, le seul bien du culte d’Israël. Saint Jean prend soin de préciser tout aussitôt : « le Sanctuaire dont il parlait, c’était son corps ».
En disant qu’il est un Sanctuaire, Jésus se constitue en lieu de la présence divine. C’est son Corps « en qui habite la plénitude de la divinité », qui est le Nouveau Temple, le lieu du nouveau culte. Jean-Baptiste avait raison de le désigner comme l’Agneau de Dieu qui enlève le péché du monde », car il fut sacrifié sur le Calvaire à l’heure même où, dans ce même Temple, on immolait d’innombrables agneaux pascals, la veille du grand Sabbat de la Pâque.
Le vrai Temple de Dieu au milieu du monde, c’est le Corps du Christ, la communauté de ses disciples accueillant sa Parole et son Pain de vie. Ce Corps, c’est aussi l’Église. Saint Paul écrivait aux Corinthiens : « Vous êtes le Corps du Christ, vous êtes le Temple de Dieu ». Le Temple de Dieu, c’est le corps de chaque baptisé. Voilà où se fonde l’éminente dignité de l’homme !
Cette grâce exceptionnelle nous est accordée chaque fois que nous célébrons l’Eucharistie, car alors le geste de la communion fait de notre propre corps la maison où le Ressuscité vient habiter. Puisse cette vérité, que nous sommes ses prolongements même en notre corps, nous faire vibrer de reconnaissance pour le Seigneur et d’amour pour nos frères et sœurs qui sont, comme nous, des Sanctuaires du Dieu vivant.
Que la Vierge Marie nous aide en intercédant continuellement pour nous auprès de son Fils. AMEN.
Père Jean-Claude DUCLOS