Ce 17ème dimanche du temps ordinaire nous offre une excellente occasion pour réfléchir sur la prière chrétienne. Dans la première lecture du livre de la Genèse, Abraham implore le Seigneur pour Sodome et Gomorrhe, démontrant une confiance totale en Dieu. Et Jésus propose ensuite, dans l’évangile, la prière par excellence : le Notre Père. Arrêtons-nous à trois affirmations qui traversent sa prière.
Saint Luc, plus que les autres évangélistes, nous présente Jésus comme un homme de prière. Et ses disciples, le voyant souvent se retirer pour prier, lui demandent de leur apprendre à prier. Ils l’ont vu souvent après une journée harassante de marche, se retirer de préférence la nuit. Ils l’ont vu rester des heures durant la nuit prier.
Mais ce qui les surprenait le plus, c’est quand parvenait à leurs oreilles quelque chose de la prière que Jésus formulait, ils l’entendaient parler à Dieu-le-Père avec ce terme familier Abba en araméen qui signifie Papa. Appellation que les apôtres, en bons juifs qu’il étaient, n’auraient jamais osé employer, tant leur conception de la divinité de Dieu, était grande et ils avaient raison. C’est pourquoi, ils se disaient entre eux : qui est-il pour oser parler à Dieu avec une telle familiarité ? Jésus nous enseigne donc à nommer Dieu avec la même familiarité dont Lui-même fait usage. Abba ! Père ! Papa ! Cela est tout à fait nouveau pour ses disciples.
Et en même temps, il leur dit : « notre Père », ce qui signifie que Dieu est autant Père pour moi que pour mon voisin de quartier, que je considère peut-être comme un homme méchant ou comme un grand pécheur. Tout homme, quelque soit son origine sociale, religieuse, peut s’adresser à Dieu en disant : Père. Il est le Père de tous les hommes ! C’est la grande nouveauté du Christianisme.
Jésus veut que l’homme de prière soit un frère pour tout le monde, un frère ou une sœur qui ne fait pas de différence ; Jésus veut que l’homme de prière soit un frère qui voit en chacun un frère ou une sœur à aimer. Posons-nous bien la question de savoir si notre prière fait de nous des frères et des sœurs pour les autres ?
La deuxième affirmation de la prière de Jésus qui me frappe ici, c’est la règne de Dieu qui doit arriver parmi nous. Le chrétien pour ma part, c’est celui qui travaille à rendre présent le règne de Dieu là où il se trouve. Il s’agit d’inventer un nouveau monde par notre prière où amour et vérité se rencontrent, et où justice et paix s’embrassent.
Oui, frères et sœurs, l’homme de la prière est un homme de paix, un homme qui a souci de la justice, c’est un homme envahi par l’amour de Dieu. L’homme de la prière est un homme qui attise partout le feu de l’amour et embrase tout le monde par sa belle conduite, sa bonne parole, ses belles manières. Que le Seigneur notre Dieu nous aide à être ses véritables hommes et femmes de prière qui inventent au quotidien ce nouveau monde qui est le reflet du règne de Dieu.
La troisième affirmation qui, pour ma part, est le sommet de cette prière : c’est le pardon, j’allais dire la miséricorde : « Pardonne-nous nos péchés comme nous pardonnons aussi à ceux qui nous ont fait des torts ». Il faut dire que la vie chrétienne authentique est une célébration de la miséricorde, c’est-à-dire que nous sommes véritablement chrétiens quand nous pardonnons aux autres, étant donné que le pardon accordé à l’autre est la condition de notre propre pardon. Ce pardon accordé et reçu est le reflet de l’amour qui doit aller jusqu’au bout.
C’est en effet le pardon qui rend l’amour possible. Et là on pourrait dire que là où il y a l’amour, là aussi il y a le pardon. Là où l’on cesse de pardonner, l’amour disparaît. Saint Jean de la Croix disait à ses chrétiens : « au dernier jour, Dieu nous jugera sur l’amour, autrement dit sur le pardon accordé à l’autre, car la mesure dont nous nous servons pour les autres, servira aussi pour vous ».
En célébrant maintenant ensemble le sacrement de l’Eucharistie, nous prierons tout spécialement Dieu de nous faire la grâce de nous aider à prendre conscience davantage de notre paternité commune et de nous apprendre à prier comme il faut, à l’exemple de son Fils et dans l’attente du don, toujours renouvelé, de l’Esprit Saint. Amen.
Père Jean-Claude DUCLOS
