Comme Jésus nous y invitait la semaine dernière, aujourd’hui Jésus à nouveau souligne qu’il est important de prier, mais il y a deux manières : celle du pharisien, parfait observateur de la Loi, et celle du pécheur, ici un publicain, c’est-à-dire au temps de Jésus, le pécheur par excellence ! A nouveau, nous pouvons être l’un ou l’autre.

                       C’est une très belle prière que celle du Pharisien. Il commence par remercier, ce que nous oublions si souvent : « Mon Dieu, je te rends grâce ». Ce qu’il est vrai, car Jésus ne l’accuse pas d’être hypocrite ; non il n’est pas voleur ni injuste ni adultère, comme tant d’autres ; oui, il jeûne deux fois par semaine et paye l’impôt dû au Temple. Jésus dit qu’il est « convaincu » d’être juste : il croit être irréprochable, car il fait ce que la Loi lui demande  vis-à-vis de Dieu : il prie et il jeûne ; et vis-à-vis des hommes : il paie ses impôts.

                       Mais il n’aime ni Dieu, ni les hommes, il ne parle pas à Dieu, car il est en monologue avec lui-même, et les hommes, il les méprise. Il n’a pas compris que la Loi consiste d’abord à aimer Dieu et à aimer son prochain comme soi-même. En fait, il ne croit pas en Dieu, il n’a pas besoin de Dieu.

                       Tandis que le publicain prie en se cachant, il n’ose pas lever les yeux vers Dieu. Il « s’abaisse », en se frappant humblement la poitrine. La prière qui monte de son cœur est un cri de confiance : « Mon Dieu », un appel au secours : « prends pitié », et un aveu : « montre-toi favorable au pécheur que je suis ». Il frappe à la porte de Dieu, comme la pauvre veuve la semaine dernière. Comme dans le psaume 33 que nous avons chanté, il est convaincu que le Seigneur « est proche du cœur brisé ».

                       « Il n’ose pas lever les yeux vers le ciel », et il espère que « sa prière traversera les nuées », va toucher le cœur de Dieu comme celle du pauvre de la première lecture et Dieu exauce sa prière : « c’est lui qui était devenu un homme juste » dit Jésus. S’il est justifié, c’est-à-dire « ajusté » à Dieu et à sa manière d’aimer comme une note de musique est juste par rapport aux autres notes, c’est que ce publicain ose reconnaître devant Dieu qu’il est pécheur et qu’il demande son aide pour se relever. C’est Dieu lui-même qui nous « ajuste » à Lui, qui change notre cœur de pierre en cœur de chair.

                       De tout cela, je retiens deux choses. Nous sommes invités à la conversion. La figure du pharisien nous invite à nous interroger sur la manière dont nous vivons les commandements du Seigneur. Est-ce dans l’orgueil et l’injustice comme le pharisien qui pense être juste ? Ou bien est-ce en nous ouvrant véritablement à la miséricorde de Dieu ? Jésus précise même que nous recevrons son amour dans la mesure où nous aimerons notre frère ou notre sœur. C’est cela ouvrir son cœur à Dieu, en s’ouvrant à son prochain.

                        Et là, nous sommes dans l’ordre de la foi. C’est la deuxième chose que je veux dire : la foi qui véritablement nous sauve, celle dont parle saint Paul, est celle du pharisien. Son ouverture de cœur lui vaut d’être accueilli, pardonné et sauvé par Dieu. La première étape de la conversion n’est donc pas de changer de vie, mais de croire vraiment en Dieu au sens de « le laisser agir en nous et de nous transformer ». Comme dit saint Paul à son ami Timothée, en tout instant de nos vies, et en particulier quand rien ne va plus, quand nous sommes abandonnés, « le Seigneur nous assiste, nous remplit de force ».

                        Seigneur Jésus, nous nous tournons vers toi, et nous voulons ouvrir notre cœur à ton amour. Nous croyons que tu répands ton amour sur nous, sans mesure, et que c’est en lui que nous puiserons la force d’avancer sur le chemin de la sainteté, sur le chemin de nos frères et sœurs. AMEN.

Père Jean-Claude DUCLOS