En méditant les lectures de la fête de la Toussaint, je n’avais jamais remarqué que dans l’Apocalypse de saint Jean, le Dieu vivant crie d’une voix forte : « Ne dévastez pas la Terre, ni la mer, ni les arbres avant que nous ayons marqué du sceau le front des serviteurs de notre Dieu. » En d’autres termes : « Ne touchez pas à la Terre, ne touchez pas à la Création jusqu’à ce que la Vie éternelle s’accomplisse. » Et j’aimerais méditer avec vous sur le lien entre la défense de la nature et la vie éternelle.
C’est un lien que l’on fait assez peu alors que cela est indispensable : le fait de voir l’importance des animaux dans la Vie des saints : saint Roch et son chien qui allait prendre du pain sur une table et l’apportait à un malade, qui léchait ses plaies et les guérissait. Saint François et le miracle des loups. Saint Antoine qui est souvent représenté avec un cochon. Saint Gilles qui retire une flèche du flan d’une biche et qui la guérit. Saint Hubert qui protège un cerf et dans ses bois apparaît un crucifix ou encore saint Jérôme partant méditer au désert guérit un lion blessé et l’amène au monastère, en faisant comme son animal de compagnie.
Ainsi le lien entre les saints et les animaux, avec la création en général, nous montre que d’une manière ou d’une autre, la vie éternelle donne un autre éclairage sur notre vie terrestre qui nous permet d’accéder à Dieu. Au fond, il nous faut découvrir que nous sommes les gardiens de la nature, que nous sommes non pas les possesseurs ni les propriétaires de cette création, mais que nous aurons à rendre des comptes.
Chacun de nos actes que ce soit avec le prochain proche, envers la création, envers les personnes qui nous sont plus lointaines retentit dans l’éternité. A la manière dont nous traitons notrre propre corps et celui des autres, c’est aussi celle dont nous traitons la Création.
Le pape François dans son texte remarquable sur l’écologie Laudato Si dit : « Le cri de la terre, c’est le cri des pauvres. Et le cri des pauvres, c’est le cri de la terre. » Il nous rappelle ainsi que tout est lié : réalité céleste et réalité terrestre vont de pair. Il est intéressant de voir la Béatitude « Heureux les pauvres de cœur » dans cette perspective : face au frère, face à la Création, n’avons-nous pas à avoir une attitude de pauvre et à vivre cette béatitude au présent ! « Le Royaume des cieux est à eux. » dit l’Évangile.
C’est ici une invitation à entrer dans une modestie face à l’utilisation des biens matériels. Et on le voit bien, le dérèglement de la Création, l’utilisation excessive des ressources vient du péché, du désir de toujours plus d’argent, de plus de pouvoir. Alors oui, pour nous croyants, c’est différent ; nous avons la vie éternelle, nous avons la multitude des saints qui ont vécu une vie unifiée avec la Création comme avec la réalité céleste qui les attend.
0n peut continuer les Béatitudes en les appliquant à la Nature. Par exemple au sujet de la douceur, par rapport à la nature qui nous entoure, c’est-à-dire en prendre soin, savoir que nous en sommes les gardiens. Le salut de tout le monde visible est lié au salut de l’homme et cette destinée universelle que nous avons, où nous sommes sauvés par le Christ, c’est aussi pour sauver la totalité du monde créé à travers nous. Ce que nous avons de plus proche concernant la nature, c’est notre propre corps qui sera glorifié, à la fin des temps, comme le dit l’Apocalypse au moment où les serviteurs de Dieu auront sur leur front le signe de l’Agneau. Oui, nos corps de misère nos corps mutilés, vieillissants, malades et handicapés seront tous glorifiés, remplis de la gloire de Dieu. Ainsi le fait de croire à la Vie Éternelle change complètement le rapport à la dignité humaine, le rapport à la création et à la créature. Ce qui explique que l’Église s’est souvent impliquée à travers les hôpitaux, les écoles, les dispensaires, l’aide sociale au service de la personne humaine en fragilité, en précarité et qui est appelée à la Vie Éternelle, à contempler Dieu face à face. Alors nous serons semblables à Lui parce que nous le verrons tel qu’il est, nous dit saint Jean.
Nous le verrons face à face dans l’au-delà, mais ici et maintenant, c’est dans la Foi que nous le contemplons. Aussi avons-besoin de demander la prière des saints : ce sont des personnes qui nous ont précédés, que nous avons connues et qui ont vécu la réalité de leur vie de façon unifiée. Ils n’ont pas été parfaits, ils avaient beaucoup de défauts, se sont mis en colère et se sont confessés, mais ils avaient Foi dans la Vie Éternelle. Nous pouvons demander leur prière pour nous-mêmes, pour qu’ils nous aident et nous soutiennent. C’est la grâce que je vous souhaite. Bonne fête de la Toussaint à chacune et à chacun. AMEN.