Jésus envoie ses disciples en mission et nous sommes bien toujours avant Pâques. Les disciples ne savent pas encore que Jésus est plus fort que la mort ; ils ne savent pas encore qu’il est près de son Père, ils n’ont pas reçu la force de l’Esprit Saint. Et pourtant, sans aucune formation que ces quelques temps de compagnonnage avec Jésus et des recommandations plutôt austères ; les voici envoyés en mission pour faire ce que Jésus seul a fait jusqu’ici : proclamer qu’il fallait se convertir, expulser beaucoup de démons, faire des onctions d’huile à de nombreux malades et les guérir ! En clair, c’est Jésus à la puissance douze !

        Il les envoie deux par deux. Pour une première fois, c’est plutôt rassurant. Les disciples ne sont pas livrés à eux-mêmes : ils auront un compagnon de route. Se sont-ils choisis ou est-ce que Jésus a fait les équipes ? Ce n’est pas dit. Nous savons juste qu’ils sont par deux. Cela permet de se soutenir, de ne pas se décourager, d’avoir quelqu’un sur qui s’appuyer. Être deux oblige aussi à un vrai témoignage. Les voilà comme forcés de vivre entre eux ce qu’ils prêchent ; quel groupe, quel couple n’expérimente pas cette obligation de conversion au quotidien. Ce n’est donc pas innocent si Jésus les envoie deux par deux. Pour réussir, il faut se supporter !

La mission ou l’évangélisation n’est pas une affaire individuelle, mais relève d’abord du témoignage. Nous avons à la vivre ensemble, en Église et en lui faisant confiance ; ce qui veut dire se laisser accompagner, former, intégrer et se laisser envoyer. Nous ne nous donnons pas notre propre mission.Nous la recevons et nous sommes envoyés. Lorsque nous nous accaparons une mission, nous ne faisons plus Église, au contraire nous faisons notre propre volonté ! Et aucune mission n’est porteuse de fruits, si elle ne naît pas de cette rencontre avec le Seigneur qui seul est capable de changer nos vies.

   Il les envoie comme des pauvres sur la route de son pays. Ils ne peuvent prendre qu’un bâton, pas de pain, pas de sac, pas de pièce de monnaie dans leur ceinture. Pas même du linge de rechange ! Pauvres de tout, les disciples seront riches que de la parole qu’ils auront à transmettre. Il n’y a rien qui pourra les distraire de leur mission. Aucun moyen de pression. La seule concession, c’est le bâton. Ils ont l’air de petits Moïse, jetés sur les routes, un bâton à la main. A moins qu’ils ne ressemblent au peuple de l’Exode qui a quitté l’Égypte en hâte, la ceinture aux reins, le bâton à la main pour aller où Dieu Lui-même les guiderait. Le bâton, c’est le symbole de la marche nécessaire et jamais achevée pour aller à la rencontre de Dieu. Les disciples de Jésus, à l’exemple du peuple dont ils sont issus, sont des hommes en marche, en pèlerinage sur la terre des vivants. Le bâton facilite la marche sur les routes escarpées et permet d’écarter le danger.

Il y a encore une recommandation : les disciples ne doivent s’arrêter que là où ils sont accueillis ! La précision donnée par Jésus sur la conduite à tenir selon qu’ils sont accueillis « si dans une localité, on refuse de vous accueillir et de vous écouter, partez et secouez la poussière de vos pieds… ». Les disciples ne doivent pas se fatiguer à évangéliser ceux qui ne veulent pas les recevoir. On ne discute pas semble-t-il ! On va vers les périphéries tant que les périphéries veulent vous entendre. Si la parole des disciples ne trouvent pas d’écho, il faut partir ailleurs. Restez chez ceux qui vous accueillent, quittez ceux qui ne veulent pas de vous ! Et laissez-leur même la poussière qui s’est collée à vos pieds en allant chez eux. En agissant ainsi, dans les deux cas, vous respecterez vos auditeurs.

L’évangile de ce 15ème dimanche du temps ordinaire semble nous dire qu’il faut se mettre en route au nom du Christ, redire son message, poser des gestes de fraternité et respecter celui que nous rencontrons. 0serons-nous miser sur cette simplicité ? Osons la simplicité évangélique, risquons une parole d’amour et de réconciliation et laissons l’Esprit Saint faire le reste. Il ne nous revient pas de convertir, mais seulement d’annoncer, de témoigner et de vivre. AMEN.

Père Jean-Claude DUCLOS